D'Âme Eve

Les arbres debout nous offrent leur ombre ainsi qu’un inestimable cadeau : la mémoire des années qui se sont écoulées grâce à l’information précieusement gardée par l’eau se trouvant dans chacune des cellules formant le bois. Le bois que l’on croyait mort est en fait une bibliothèque naturelle !

Pour nous, humains, dans quelle partie de notre corps gardons-nous la mémoire du temps passé ?

Et de quelle mémoire sommes-nous la bibliothèque vivante ?

Mon expérience m’invite à croire que nous sommes porteurs d’une mémoire intergénérationnelle et que nos maux sont peut-être les mots de nos aïeuls.

Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai l’impression que je danse la vie bouillonnante et sauvage alors qu’il m’a été demandé, dès mon plus jeune âge, d’être une enfant sage.

J’adorais grimper aux arbres, courir dans les champs, faire du vélo dans la boue, rouler à moto en longue jupe et sabots (impensable avec les normes de sécurité actuelles !!)

Seulement, le modèle de l’enfant « saine d’esprit » était chaussures vernies, chaussettes blanches jusqu’aux genoux et jupe plissée sous blouse blanche….qu’est-ce que cela me grattait ! Et puis cela se salissait tellement vite que j’ai cru que je n’étais pas normale : tu ne fais pas attention, tu n’es pas sage, tu pourrais te tenir tranquille, arrête de bouger, de parler, de rire, tu fais trop de bruit !!

A 18 ans, lors du choix des études supérieures, j’hésite entre journalisme et psychologie. Je n’oserai jamais la clinique de peur d’être tout de suite repérée comme folle par les professeurs.

Se sentir différente, inadaptée et avoir peur d’être folle colore ma mémoire.

Je dévore les livres de psycho pour me rassurer

Je deviens un personnage construit de bric et de broc du développement personnel

Je contrôle, je tiens bon…

Mon frère aîné, passionné par la généalogie, met en lumière que notre grand-père n’a jamais connu sa propre mère, internée sa vie durant. Cet événement familial n'est jamais abordé et le mot « folie » lui a été associé.

40 ans plus tard, je revisite notre lignée grâce aux constellations familiales et je découvre une arrière-Grand-Mère, douce, allongée, nous envoyant sa tendresse.

Il y a une semaine, je demande à mon frère les informations qu’il a récoltée à son propos et là, stupeur, j’apprends qu’elle a été internée uniquement pour dépression ! Quel choc !

Résonnent à mes oreilles les paroles de l’Oracle du Vent incorporé par Arnaud Riou : quel est ton lien à ton prénom ? m’a-t-il demandé et de poursuivre : « Moi, j’entends, « Je ne vis Eve » 

Cette femme de ma lignée, cette Eve qui m’a précédée, cette Marie ainsi nommée, je désire l’honorer, lui rendre hommage en m’incarnant, visible et en libérant cette peur d’être « folle » qui n'a plus lieu d'être.

Je me sens D’âme Eve